Directrice sportive dans le cyclisme, Mélanie Briot nous embarque dans son quotidien avec les coureurs

21 janvier 2021

À l’occasion de l’opération « Sport Féminin Toujours » lancée par le ministère des Sports et le CSA, Femix’Sports s’associe au nouveau média digital ÀBLOCK! pour mettre en lumière les métiers de la sphère sportive, ces métiers à féminiser d’urgence pour davantage d’équité et d’équilibre dans cet univers encore trop masculin. 10 métiers, 10 femmes, 10 témoignages.

 

Seule femme dans le cyclisme à être devenue directrice sportive d’une équipe de Nationale 1, Dinan Sport Cycling, Mélanie est une passionnée de vélo depuis toujours. Vivre au plus près des courses cyclistes, voilà ce qui la motive à partir sur la route toute la sainte journée. Et elle pourrait bien entraîner d’autres filles à prendre ce virage nécessaire pour la féminisation des métiers du sport…

 

« J’ai toujours aimé le sport, mais la pratique du vélo, c’était sûrement parce que mon père était dans ce sport, c’est une histoire de famille ! J’ai commencé à l’âge de 11 ans et j’ai très vite été passionnée. J’ai couru sous les couleurs des pays de la Loire et de la DN de Normandie où j’ai participé aux différents Championnats de France et coupes de France… jusqu’au moment où mon travail ne me permettait plus de m’entraîner et de faire des compétitions le weekend.

 

C’est tout naturellement que j’ai voulu travailler dans le cyclisme. Je me suis alors dirigée vers des études de STAPS (Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives, ndlr) à Nantes et j’ai poursuivi là-bas avec un stage dans une équipe. C’est cette expérience qui m’a donné envie d’être directeur sportif. J’ai donc continué pour décrocher un master et le brevet d’État – aujourd’hui diplôme d’État de la Jeunesse, de l’Éducation Populaire et du Sport (DEJEPS)- qui est indispensable pour ce métier.

 

J’allais suivre beaucoup de courses avec mes parents et j’étais très intéressée par les voitures qui suivaient les cyclistes ! J’ai eu ensuite la chance, via une connaissance, lors de la Classic Loire-Atlantique, de monter dans une voiture de directeur sportif. Et c’est un peu ça qui a pavé la voie pour moi. J’ai vraiment découvert un métier : plein d’adrénaline, jamais routinier, dans l’action, où il faut toujours s’adapter aux différents coureurs et courses. C’est, littéralement…sport ! Et donc, au moment de faire le stage de licence, je me suis dit : « Pourquoi pas le faire dans une équipe de vélo ! ».

 

Quand j’ai commencé à exercer, j’ai réussi à accéder en tant qu’entraîneur à une équipe de Nationale 1. Je me voyais par la suite en tant que directrice sportive, à faire les courses en voiture etc. Mais l’équipe s’est arrêtée et mon rêve s’est écroulé du jour au lendemain… J’ai dû relever la tête et je me suis dit : « Bon, allez, c’est pas fini ! ». Et, là, j’ai eu une belle opportunité. Le président du club de Cholet cherchait un directeur sportif dans cette équipe en National 2, c’était reparti !

C’est un petit milieu et quelqu’un m’a recommandée auprès du club, une chance ! On m’a ensuite proposé mon poste actuel au Team Pays de Dinan, qui était également en N2, et j’ai accepté, même si j’étais très bien là où j’étais. Le projet était d’accéder en N1. Un beau challenge ! Et on l’a réussi en 2019 en gagnant la Coupe de France.

 

Ici, mon métier consiste à gérer une équipe de quinze coureurs hommes qui ont entre 18 et 30 ans. C’est d’abord un travail de l’ombre : s’occuper de toute la partie logistique jusqu’au jour J de la compétition comme l’organisation des déplacements, les réservations d’hôtels. Ensuite, c’est le travail sur le terrain où l’on va analyser les adversaires, le parcours, le vent, la météo, les bosses, informations que l’on transmettra aux coureurs avant d’établir une stratégie en lien. Il y a aussi tout un travail de relations humaines et de confiance à établir avec les coureurs, c’est presque du management !

 

Plus concrètement, comme exemple de mes fonctions, je peux citer ce qui m’a toujours fait vibrer : le fait de driver les coureurs pendant les courses depuis la voiture que je conduis. Chez les amateurs, on n’a plus les oreillettes – comme chez les pros – pour communiquer avec ses coureurs donc on doit développer des stratégies en amont et remonter la file de voitures pour échanger avec le cycliste quand il le demande. Il y a un arbitre qui repère ceux qui lèvent la main. En venant à leurs côtés, on discute par la fenêtre, on les ravitaille ou on gère les éventuelles crevaisons.

 

Même si je n’ai ressenti aucun sexisme ou discriminations pour arriver à ce poste, il est vrai qu’on est, encore aujourd’hui, très peu de directrices sportives, au contraire des assistantes qui sont au petit soin des coureurs en préparant les repas d’après-courses, les ravitaillements et, lors des courses à étapes, favoriser la récupération des coureurs par les massages. Très peu de femmes dirigent les équipes ! Après, comme dans tout métier, les filles sont malheureusement attendues au tournant. Mais il faut faire son bout de chemin, ne pas trop s’occuper du regard des autres et, surtout, prouver qu’on est capables de mener son équipe.

 

Je pense que devenir directrice sportive m’a permis de prendre un peu de recul et de prouver que j’en étais capable, de savoir gérer les critiques et gagner en confiance. En étant une femme, on doit clairement se battre, surtout quand on manage des hommes. Ce n’est pas forcément facile tous les jours. On se remet souvent en question. Je me demande, par exemple, comment ils vont accepter mes remarques et ma gestion alors que je suis seule face à eux et qu’ils n’ont jamais eu de femme directrice auparavant… Mais, malgré tout, je suis très compétitrice, que ce soit sur le vélo ou dans la vie, je réfléchis et je fonce. C’est un caractère qui aide aussi parfois…

 

Pour exercer ce métier, je dirais qu’il faut être à l’écoute, et en permanence, de ses coureurs. J’ai des jeunes qui ont entre 18 et 25 ans et je sais qu’ils ont constamment besoin d’être motivés, de savoir qu’ils font bien les choses.

 

Ce qui prime dans mon club, c’est l’état d’esprit du coureur, celui qui mettra tout en œuvre pour y arriver, et pas forcément ses performances sportives. J’aime insuffler l’esprit de cohésion – on a vraiment un état d’esprit très familial dans l’équipe, on souhaite le conserver, même en haut niveau – mais aussi de la rigueur et de l’exigence, tout en se faisant plaisir. La devise de l’équipe, c’est « Être sérieux sans se prendre au sérieux » ! Et puis le but, chez nous, c’est de faire en sorte que les coureurs soient une bande de copains, de manière à établir une cohésion d’équipe.

 

Mon rêve était donc d’être directeur sportif, je l’ai réalisé. Ce que je pourrais faire de mieux serait de passer en équipe pro. Une femme a réussi ce virage dans le milieu du cyclisme : la Britannique Cherie Pridham qui est devenue la première directrice sportive au sein d’une formation masculine du circuit World Tour. C’est une belle reconnaissance… Pourquoi pas suivre ses traces ! »

 

*Devenir Directeur/Directrice sportive cyclisme :

En résumé, le directeur sportif cyclisme, qui n’est ni entraîneur ni dirigeant du club, a un poste multitâches essentiel à la survie de l’équipe puisqu’il supervise la logistique des déplacements, les consignes en terme de stratégie sur les courses, le management de l’équipe et la conduite de la voiture suiveuse pendant les courses.

 

Quelle formation ? C’est via l’obtention du « Diplôme d’État de la Jeunesse, de l’Éducation populaire et du Sport » (DEJEPS) mention « Cyclisme traditionnel » et spécialité « Perfectionnement sportif » que l’on peut accéder au métier de directeur sportif. Ce diplôme atteste que son titulaire met en œuvre, dans l’ensemble des trois disciplines du cyclisme sur route, sur piste et du cyclo-cross, les compétences figurant dans le référentiel de certification : concevoir des programmes de perfectionnement sportif ; coordonner la mise en œuvre d’un projet de perfectionnement ; conduire une démarche de perfectionnement sportif ; conduire des actions de formation.

Les conditions d’entrée aux formations DEJEPS ? Être âgé de plus de 18 ans (dérogation pour les apprentis), fournir l’attestation de JDC (Journée Défense et Citoyenneté, ex- JAPD), être titulaire d’une attestation de formation aux premiers secours (AFPS) ou du PSC 1 (Prévention et Secours Civiques de niveau 1), réussir le Test d’Exigence Préalable (TEP) et les épreuves complémentaires de sélection.

 

Pour en savoir + sur les emplois et métiers autour du sport, direction le site du ministère des Sports

 

Le témoignage de Mélanie a été recueilli dans le cadre de notre opération visant à féminiser les métiers du sport. En partenariat avec « ÀBLOCK! Le sport qui fait bouger les lignes », nouveau média digital sur les femmes dans le sport.

Sur les réseaux sociaux, utilisez #SportFémininToujours et #PlusDeSportAuFeminin

 

© illustration :  Lisa Lugrin